Les zones non traitées points d’eau (ZNT points d’eau) 

Mis à jour le 16/11/2023

Des zones non traitées pour limiter la pollution de l’eau

Afin de limiter les transferts atmosphériques et de préserver la qualité des eaux, l’utilisation des produits phytopharmaceutiques (PPP) est interdite à proximité de l'eau et des zones d'écoulement. Cela concerne tous les PPP : herbicides, fongicides, insecticides, anti-limaces,... y compris les produits de biocontrôle, les produits à faible risque et les produits autorisés en agriculture biologique.

Cette interdiction de traitement s’applique à la fois aux points d’eau et aux autres éléments du réseau hydrographique.

Sur les points d’eau : pas d’application directe ni à proximité, même à sec

Il est interdit de traiter sur les points d’eau et de part et d’autre, même à sec, sur une distance allant de 5 m à 100 m ou plus selon les produits : c’est ce qu’on appelle la zone non traitée (ZNT). Cette distance est indiquée sur l’étiquette du produit. En l’absence de mention de cette distance, la ZNT est au minimum de 5 m.

Schéma zone non traitée (ZNT)

 

Les points d’eau sont tous les éléments du réseau hydrographique définis par l’article L. 215-7-1 du code de l’environnement (cours d’eau) ou qui apparaissent sous la forme de points bleus ou de traits bleus continus ou discontinus sur la carte papier de l’institut géographique national (IGN) à l’échelle du 1 : 25 000ème ou sur le site internet https://www.geoportail.gouv.fr. Cela concerne donc tous les cours d’eau permanents ou temporaires, plans d’eau, sources, lavoirs...

Fond de carte : Copyright IGN Scan 25

Fond de carte : Copyright IGN Scan 25

 

Les ZNT de 50 m et 20 m peuvent être réduites à 5 m en cas de respect des deux conditions suivantes, définies par l’ arrêté ministériel du 4 mai 2017 modifié :

  • mise en place d’un dispositif végétalisé permanent d’au moins 5 mètres de large en bordure des points d’eau. Ce dispositif peut être herbacé ou arbustif tant que le sol n’est jamais à nu. Les espèces envahissantes sont à proscrire et les espèces indigènes à favoriser (ex : bois de joli coeur, bois d’arnette, zambaville, bois de fièvre, ...). Le site du projet DAUPI peut vous aider à choisir des espèces adaptées.
  • mise en œuvre de moyens permettant de diviser la dérive de pulvérisation par au moins trois. Ces moyens doivent figurer sur une liste publiée au Bulletin officiel du ministère chargé de l’agriculture.

Une plaquette décrivant la réglementation sur les ZNT points d’eau a été élaborée en 2023 par la DEAL Direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement et la DAAF Direction de l'alimentation, de l'agriculture et des forêts. Cette plaquette est disponible auprès de vos conseillers agricoles, que vous pouvez également solliciter en cas d’interrogation sur la réglementation des ZNT points d’eau.

Afin d'informer les utilisateurs de produits phytopharmaceutiques, une affiche couleur au format A3 résumant la réglementation doit également être affichée de façon visible pour le public dans chaque lieu de distribution de produits phytopharmaceutiques.

Si un doute persiste, par exemple sur le statut du point d’eau, l’endroit à partir duquel s’applique la ZNT, ou encore sur la cohérence entre la carte IGN et la situation réelle sur le terrain, vous pouvez saisir les autorités compétentes (DAAF, DEAL) pour une expertise complémentaire en envoyant un courriel avec des éléments descriptifs (localisation, extraits de carte, ...) à l’adresse : znt974@developpement-durable.gouv.fr.

 

Sur tous les autres éléments du réseau hydrographique : pas d’application directe, même à sec

Il est interdit d’appliquer directement des PPP sur les autres éléments du réseau hydrographique, même à sec. Cela concerne les fossés, collecteurs et bassins de rétention des eaux pluviales, puits, forages, avaloirs, caniveaux, bouches d’égout

Zone interdite de traitement

  

Les produits phytopharmaceutiques, un enjeu environnemental et de santé publique

Les impacts environnementaux

En 2021, plus de 650 tonnes de produits phytopharmaceutiques (PPP) ont été vendues à La Réunion, principalement des herbicides utilisés en agriculture. Ces produits sont utiles à l'agriculture mais leur utilisation entraîne une pollution de l'air, des sols et de l’eau.

En particulier, cours d’eau, étangs, nappes phréatiques et zones côtières (dont le lagon) se retrouvent contaminés par transfert atmosphérique ou suite au ruissellement et à l’infiltration des eaux chargées en PPP, surtout dans le Nord et l’Est de l’île et sur les étangs du Gol et de Saint-Paul. Les cours d’eau intermittents sont également affectés par cette contamination. En effet, même s’ils ne coulent qu’une partie de l’année, les PPP s’y accumulent dans le sol au fil des mois et sont transférés aux cours d’eau permanents lors des épisodes pluvieux.

Illustration : Combava d’après OFB, 2015

 

A La Réunion, les molécules issues des PPP sont détectées en 2023 dans 32 % des captages d’eau destinées à la consommation humaine, à des concentrations variables. Lorsque ces concentrations sont trop importantes, des mesures curatives très coûteuses doivent être mises en place par la collectivité :

  • arrêt des captages : 9 captages d’eau potable ont dû être arrêtés depuis 2004 à La Réunion en raison de taux de pesticides trop élevés ;
  • traitements complémentaires de potabilisation : une usine de traitement des pesticides par charbon actif a par exemple été construite en 2018 au niveau du forage Les Cafés à Sainte-Marie. Ces travaux ont coûté 1,7 millions d’euros, auxquels viennent s’ajouter 150 000 €/an de coûts d’exploitation.
Usine de traitement du forage les Cafés Ste-Marie

Usine de traitement du forage les Cafés. Photo : ARS Réunion

  

Par ailleurs, les PPP sont par nature des substances toxiques pour les êtres vivants. Leur présence dans l’environnement conduit à une imprégnation généralisée des êtres vivants. Cela se traduit par des impacts sur la reproduction et les comportements et entraîne une augmentation de la mortalité directe ou indirecte qui touche toutes les espèces (insectes, oiseaux, poissons et crustacés, coraux...). Il s’agit d’une cause majeure de l’érosion de la biodiversité.

Les impacts sur la santé publique

De très nombreuses études scientifiques ont démontré qu’il existait des présomptions fortes de liens entre l’exposition aux pesticides et 6 pathologies pour les professionnels manipulant les produits. Ce risque est probablement sous-estimé du fait de l’ « effet cocktail » encore méconnu, qui rend plus nocives certaines substances chimiques lorsqu'un organisme y est exposé simultanément. Ces études ont abouti à l’inscription progressive de 3 maladies au tableau des maladies professionnelles en agriculture : Parkinson (2012), lymphome malin non hodgkinien (2015) et cancer de la prostate (2021).

Le risque de pathologies augmente également chez les enfants exposés ou dont la mère l’a été pendant la grossesse.

Illustration : Combava d’après OFB, 2015

 

La société civile s’est fortement mobilisée ces dernières années pour aboutir à des réglementations plus protectrices de la santé humaine.

L’ exposition des agriculteurs réunionnais aux PPP a été étudiée en 2010 par Santé publique France sur les cultivateurs de canne. Sur les 13 substances actives utilisées, 7 avaient des effets cancérogènes, reprotoxiques ou perturbateurs endocriniens. 88 % des agriculteurs avaient été exposés à au moins une de ces substances, soit 6 330 personnes (hors main d’œuvre non permanente).

 

Ensemble, préservons la qualité de l’eau

La réglementation des ZNT points d’eau est issue de l’ arrêté ministériel du 4 mai 2017, décliné à La Réunion par l’ arrêté préfectoral n°2481-2023-SG/SCOPP/BCPE du 14/11/2023 .

Elle s’applique à tous les utilisateurs de PPP : agriculteurs, applicateurs en prestation de service, collectivités, jardiniers amateurs. Leur non-respect est puni de sanctions pouvant aller jusqu’à six mois d’emprisonnement et 150 000€ d’amende.

Les ZNT points d’eau complètent les autres règles déjà applicables sur l’utilisation des PPP, en particulier :

  • les bandes tampon végétalisées de 10 m le long des cours d’eau BCAE ;
  • l’utilisation de buses adaptées au traitement, à contrôler régulièrement ;
  • la vérification des conditions météo et le respect des prescriptions : vent inférieur à 19 km/h, pas de fortes pluies annoncées ;
  • le certificat Certiphyto valide (PPP professionnels) ;
  • le respect de la charte ZNT riverains (= charte du bien vivre ensemble à La Réunion : engagements et bonnes pratiques d'usage des PPP).

  

Quel accompagnement pour changer ses pratiques ?

Il est possible de cultiver sur les ZNT « points d’eau », mais cela implique des changements de pratiques : désherbage mécanique ou thermique, paillage, fauchage, couverture végétale entre deux cycles, implantation de plantes de service, lutte biologique, piégeage, plantes pull/push… Les agriculteurs peuvent être accompagnés dans ces changements.

Gestion de l’enherbement de l’inter-rang de la canne à sucre : micro-équipement (gauche), plantes de service (centre), bineuse (droite)

Gestion de l’enherbement de l’inter-rang de la canne à sucre : micro-équipement (gauche), plantes de service (centre), bineuse (droite). Photos : GIE eRcane

 

Les dispositifs d’expérimentation et de transfert du plan Eco-Phyto II+ peuvent être mobilisés pour faire évoluer les pratiques culturales en diminuant la consommation de PPP : réseaux DEPHY « ferme » et « expé », RITA... Qu’il s’agisse de canne à sucre, de maraîchage ou encore de vergers, une abondante documentation technique est disponible sur Internet.

Demandez conseil auprès de vos conseillers agricoles (chambre d’agriculture, organisations professionnelles, instituts techniques, ...).
Plus d’info sur EcophytoPIC, le portail de la protection intégrée des cultures

Des dispositifs financiers existent également pour accompagner les changements de pratique culturale à l’échelle de la parcelle ou de l'exploitation. Le catalogue 2023-2027 des mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) et des aides à la conversion et au maintien en agriculture biologique (AB) est disponible sur le site de la DAAF.

L’équipement des agriculteurs en outils mécaniques de substitution aux pesticides peut être également subventionné dans le cadre des fonds FEADER ou nationaux, voire locaux.